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Page:Journal asiatique, série 11, tome 5.djvu/24

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JANVIER-FÉVRIER 1915.

roi des montagnes : jour et nuit, il s’assurait la sécurité par une formule magique. Mais un jour qu’il s’était laissé tenter par les séductions du sexe, comme il circulait avec tout un sérail de paonnes, il se trouva surpris par des ennemis qui l’enserrèrent dans des liens. La formule magique cette fois encore le tira d’affaire. Le Jātaka pāli a utilisé par deux fois cette donnée, dans le Morajātaka (159) et dans le Mahāmorajātaka (491), en la corsant d’inventions romanesques et de leçons édifiantes. La rédaction la plus courte a fidèlement préservé l’élément magique ; elle reproduit les stances d’adoration que le paon adressait au soleil levant et au soleil couchant ; la stance de conclusion correspond de près au texte sanscrit de la Mahāmayūrī[1]. La prière du paon y est expressément désignée comme une parittā, une « protection » ; le commentateur glose ce terme par rakkhā, l’équivalent du sanscrit rokṣā que nous avons déjà rencontré dans le titre canonique de la Pañcarakṣā[2]. La valeur magique de cette formule était si bien consacrée dans le bouddhisme pāli qu’on l’a introduite dans le recueil appelé Paritta « la protection » par excellence, constitué

  1. Moraj., v. 18 :

    ye brāhmaṇā vedagū sabbadhamme
    te me namo te ca maṁ palayantu
    nam’ atthu Buddhanaṁ nam’ atthu bodhiyā
    namo vimutlānaṁ namo vimuttiyā.

    Mahāmāy., p. 222 d’Oldenbourg, et Bower manuscrit, VI, p. 225 :

    ye brāhmaṇā vāhilapāpadharmā
    teṣāṁ namas te ca māṁ pāgyantu
    namo’ stu buddhāya namo ’stu bodhaye…
    namo vimuktāya namo vimuktaye.


  2. M. Rockhill. (Tibetan Buddhist Birth-stories, dans J.A.O.S., XVIII, 1897, p. 12) a traduit un autre jātaka construit sur la même donnée que les deux jātakas palis, et qu’il a extrait du Śrīgupta-sūtra tibétain (Mdo, XVI, 427-451). L’ouvrage correspondant en chinois (Nanj., 232 ; éd. Tok., VI, 6 : Fo-chouo tö-hou tch’ang tchö king, traduit par Narendrayaśas en 589) ne contient pas ce jātaka.