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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

assez au courant pour le défendre convenablement, ou bien, s’ils le sont, ils cachent ce qu’ils savent, ce qui revient au même. Je fais une visite à Mme de Chastellux. À huit heures arrive la duchesse, qui me fait remarquer sa ponctualité ; ensuite Mme de Ségur, qui me dit que La Fayette ne fera pas partie du ministère, au moins pour l’instant. Après avoir fait le thé, etc., je vais voir Mme de Flahaut, qui revient de l’Opéra. L’évêque arrive et je lis ma lettre à La Fayette, que madame traduit au fur et à mesure, mais Capellis arrive avant qu’elle ne soit finie, et reste jusqu’à minuit ; nous partons tous ensemble.


17 octobre. — Laurent Le Couteulx dîne avec moi aujourd’hui et nous parlons de l’envoi de blé et de farine d’Amérique. Je lui donne des renseignements, et lui dis que, s’il veut s’y intéresser, je puis lui être utile. Mon désintéressement le porte à accepter. Il propose de s’y intéresser en tiers ; j’y consens et je le prie de préparer ses lettres et de me les envoyer. Nous parlons ensuite de l’affaire des tabacs. Il n’est pas disposé à donner le crédit que je demande, hésite et cherche à éluder la question. Heureusement, ma voiture arrive, et je lui dis qu’un engagement pressé me force à le quitter. Je vais au Louvre et je conduis Mme de Flahaut au couvent pour rendre visite à sa religieuse, Mme Trent, qui est autant de ce monde que peut l’être une personne vouée à l’autre. La vieille dame admire son bon air et ne veut pas croire qu’elle a été indisposée. Nous rentrons, et je la laisse pour recevoir son évêque. Pour la première fois elle laisse tomber à son égard un mot qui est cousin germain du mépris. Je puis, si je le veux, la détacher de lui complètement. Mais c’est le père de son enfant, et ce serait injuste. La raison secrète est qu’il manque de fortiter in re, quoique abondamment pourvu de suaviter in modo, ce qui n’est pas suffisant. Je vais chez Mme de Chastellux ; la duchesse s’y trouve avec