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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

bien un dîner de famille. Il s’en va, et je dis à Mme de Flahaut mon regret d’avoir interrompu une telle scène. Elle parle beaucoup de son enfant et pleure abondamment. J’essuie ses larmes au fur et à mesure. Cette attention silencieuse amène des déclarations d’affection sans fin. Elle est absolument sincère en ce moment, mais rien ici-bas ne peut durer toujours. Nous allons ensemble chez Mme de Laborde, et faisons une courte visite, l’enfant étant avec nous. Je la descends au Louvre et vais chez Mme de Chastellux. La duchesse, qui n’était pas bien pendant le dîner, ne va pas beaucoup mieux maintenant, ou plutôt elle va plus mal, ce qui arrive ordinairement à ceux qui souffrent de la lassitude de l’indolence. Le manque, aussi bien que l’excès, d’exercice rend le sommeil nécessaire.


29 octobre. — Après avoir dîné chez M. Boutin, je vais chez Mme Necker, où j’entretiens M. Necker de la question des vivres. Il accepte l’idée d’un traité pour 20,000 tonneaux de farine, mais ne veut pas faire l’espèce de traité que je proposais. Il me demande ce que la farine coûtera. Je lui dis qu’elle coûtera environ 30 shillings sterling et je m’offre à la livrer à 31 ; il la veut à 30, et demande que je lui écrive une note à ce sujet, pour la communiquer au roi. Il ne veut pas entendre parler d’importer du porc et du riz à distribuer aux pauvres. J’essaye de lui montrer qu’en agissant ainsi et en laissant le pain se vendre à son prix, le Trésor y trouvera son avantage, parce que bien peu accepteraient le don gratuit, tandis que tous profiteraient de la baisse du pain. Il a tort, mais humanum est errare. Je vais chez Mme de Chastellux. Son frère est mort. La duchesse vient en retard et le thé est reculé, et finalement ces divers retards m’obligent à les quitter brusquement. Au Louvre, Mme de Flahaut m’attend. Nous allons souper chez Mme de Laborde.

M. d’Affry et moi, nous devons chacun, paraît-il, boire