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Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/181

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ANNÉE 1790

1er janvier. — Le premier jour de l’an quelques amis viennent me présenter les souhaits habituels, et je vais moi-même faire différentes visites, entre autres au baron de Besenval au Châtelet. Il est un peu contrarié de trouver son procès encore retardé. Il reçoit une visite des dames de la Halle ; quoique Parisiennes, elles lui adressent en mauvais français leurs compliments sincères, et lui promettent amitié et assistance, ce qui n’est pas à mépriser. Il les traite naturellement avec respect, tandis que Mmes d’Oudenarde et La Caze les poussent à des actes de violence. C’est là la vraie caractéristique des femmes courroucées. Je vais chez M. de La Fayette. Les invités sont lents à arriver, et le dîner a lieu à quatre heures et demie. Il m’informe que Monsieur et Mirabeau sont étroitement unis, que l’un est une créature faible et indolente, l’autre un coquin actif et rusé. Je lui dis qu’il faut terminer le procès de Besenval, parce que l’on commence à prendre son parti, et que, par suite la violence du torrent peut se tourner contre ceux qui le poursuivent ; cette réflexion le touche. À ma grande surprise, il ajoute que, malgré mes critiques de l’Assemblée, je dois reconnaître la supériorité de la nouvelle Constitution sur celle de l’Angleterre. Je l’assure qu’il se trompe beaucoup, s’il croit que c’est là mon opinion. Je rends visite à Mme de Staël, qui exprime avec bienveillance sa crainte que je ne l’eusse oubliée ; je reste jusqu’à dix heures et demie, puis je vais au Louvre où m’attend l’évêque d’Autun. Je lui explique un plan dont j’avais fait part à Mme de