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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

duit quelque effet sur des esprits raisonnables, ce sera de prouver plus clairement la faiblesse de ses ministres. Depuis trois mois ils n’ont fait que s’élever contre les procédés de l’Assemblée : aujourd’hui ils semblent lui apporter la pleine approbation de Sa Majesté. Je vais de là chez M. de La Fayette. Il me demande ce que je pense de cette démarche, et il est fort surpris d’apprendre que je la blâme. Je lui dis que je ne pense pas qu’elle puisse faire du bien, qu’elle devra donc faire du mal. Il répond qu’elle lui permettra de plaider la cause de l’autorité royale dans l’Assemblée.


5 février. — Je dîne aujourd’hui avec le prince de Broglie, et je vais ensuite chez Mme de Chastellux. Le prince de Hesse arrive et nous raconte ce qui s’est passé en Brabant à propos des 12,000 hommes de troupes hessoises, que l’on a demandés et qui arriveront probablement. On en est exactement au point que je soupçonnais depuis longtemps. En réponse à une question de Mme de Chastellux, je donne mon avis qu’il discute un peu, mais en s’en allant il me dit que toute difficulté disparaîtrait si le prince de Brunswick était à la tête des affaires ; c’est le baron de Hertzberg, dit-il, qui l’en empêche. Je trouve Mme de Flahaut, dînant avec Mlles Fanny et Alice, nièces de sa religieuse. Après le dîner, je descends avec Mme de Flahaut pour répondre à une lettre. À peine suis-je entré que l’on m’oblige à rester, par un simple tour de clé à la serrure, et je dois renoncer à ma visite projetée au commandant général. Je me rends de là chez Mme de Vannoise. Une certaine Mme de Pusy qui se trouve là semble être en quête de consolations. Je vais chez Mme de Laborde. Je fais la connaissance d’une dame Williams, femme d’un officier d’artillerie anglais, et fille du docteur Mallett, l’ami de lord Bolingbroke. Elle me fait des compliments, qui sont trop piquants pour mes nerfs ; ils auraient pu passer en français, mais ils me révoltent en anglais.