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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

drait rien avec Chauvigny avant d’avoir réglé ses comptes avec le duc de Castries (colonel du régiment) « qui m’a détaché ce spadassin-là ». Naturellement de Castries demande réparation, et l’on va sur le terrain, où les amis de Lameth, qui est de première force à l’épée, s’opposent à l’emploi de pistolets. En vrai chevalier, de Castries accepte de vider l’affaire à l’arme blanche, et blesse son adversaire. En conséquence, la populace détruit la propriété de son père. Ce n’est pas ordinaire ; je crois qu’il en sortira des résultats que l’on ne soupçonne même pas actuellement. L’Assemblée (aux mains des Jacobins) a, dit-on, sanctionné ce qui s’est passé aujourd’hui.


14 novembre. — Ce matin le comte de Moustier vient me voir. Nous discutons ensemble son plan de Constitution, et il me dit jouir à la Cour de plus de crédit qu’il ne l’aurait jamais cru. Il me raconte qu’il est personnellement dans les bonnes grâces de la reine, et il s’attend bientôt à ce que l’on demande ses conseils. Le roi et la reine, me dit-il, sont décidés à ne pas abuser de leur autorité, si jamais ils la recouvrent. Il ajoute incidemment que le roi et la reine lui ont tous deux parlé de moi, le premier deux fois, et qu’ils ont de moi une opinion favorable. Ceci peut être utile à mon pays plus tard.

Je rends visite à Mme de Flahaut. Il me semble, à en juger par les apparences, que l’on attend lord Wycombe ; je le dis, mais elle répond que c’est l’évêque. Les invités me suivent de près : Mme de Laborde et Mme de La Tour, puis Montesquiou ; quand nous sommes tous là, arrive lord Wycombe, et il est aussitôt évident que le rendez-vous était pour lui. Nous partons tous, mais bientôt après je reviens en disant à Mme de Flahaut « que je lui serai à charge, pour quelques moments de plus ». Mon lord est plus déconcerté qu’elle. Il ne paraît point encore arrivé au point où il vise. Je me rends ensuite au club, où je trouve