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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

la forêt de Meudon, une partie de la populace, au nombre d’environ un mille, s’y rendit ; parmi eux se trouvaient des assassins dont le but était de le tuer, et une récompense de mille guinées était promise au misérable qui accomplirait l’acte. Il ajoute que le comte de Saint-Priest, en étant informé, prévint d’urgence Sa Majesté de revenir immédiatement à Versailles pour affaires importantes ; ce message a excité contre lui l’animosité du parti violent à un degré dont ou a pu juger par la suite. L’abbé croit tout ceci, mais je dois avouer qu’il n’en est pas de même de moi. Je pense qu’il y a assez de petites infamies dans ce parti, mais je doute qu’il s’y trouve de hardis criminels.


23 février. — Le marquis de Favernay me raconte que le Languedoc est dans une bien mauvaise situation. Une sorte de guerre civile s’y est allumée entre catholiques et protestants. Il dit que ces derniers, qui sont riches, ont corrompu les troupes nationales, et tourné leurs épées contre les catholiques, sous prétexte de soutenir la nouvelle Constitution. Je suppose que les autres racontent l’affaire différemment, mais il paraît assez évident qu’à Nîmes et à Uzès on en est venu aux mains. Je vais au Louvre à neuf heures pour emmener Mme de Flahaut souper avec Mme de Nadaillac. Selon son habitude, elle n’est pas prête et nous n’arrivons qu’à dix heures. Notre hôtesse est charmante. Elle prétend que je serai aristocrate, bon gré mal gré. Elle m’assure de sa religion et de sa moralité, etc., mais c’est une coquette, enthousiaste et romantique.


24 février. — À midi, je me promène jusqu’à la fatigue ; puis je vais au Louvre où je vois Mme de Flahaut. Elle est alitée ; je joue au whist avec elle, l’enjeu étant de six pence. L’évêque d’Autun a une peur horrible de la mort. En rentrant chez elle, hier soir, elle a trouvé dans