Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

5 mars. — Aujourd’hui, le comte de Ségur vient me voir. Je lui demande quel est le caractère du comte de La Marck et du comte de Mercy. Il répond que le premier est un militaire qui s’entend à son métier, et que, dans les affaires du Brabant, son plan était de créer un parti populaire qui, en cas d’indépendance, serait considéré comme le parti français ; ou tout au moins de semer des dissensions pour faciliter le rétablissement de l’autorité impériale. Le comte de Mercy serait un des hommes d’État les plus capables de l’Europe. Je rends visite à Mme Dumolley, qui désire beaucoup mes visites, parce qu’elle trouve que je fréquente des gens qu’elle ne peut fréquenter. Je la quitte et vais au Palais-Royal souper avec la duchesse. Mme de Saint-Priest qui est là désire avoir mon avis sur ce qui s’est passé dernièrement au Louvre. J’évite adroitement de répondre, et Mme de Chastellux me le dit. Elle en est un peu froissée, parce que, dit-elle, on citera contre elle mes paroles que l’on prendra dans un sens absolument différent du vrai. Je lui parle du comte de La Marck, et découvre qu’elle est en rapports avec lui. Il est lié intimement avec Mirabeau ; l’ambition le dévore et sa moralité est déplorable. Nous voilà donc au fait. M. d’Agout arrive. Il revient de Suisse, et m’apporte les compliments de Mme de Tessé, qui s’est, à ce qu’elle dit, convertie à mes principes de gouvernement. Il y aura encore beaucoup de ces convertis.


7 mars. — Ce matin, j’écris, car je ne suis pas encore très bien. Le soir, Mme de Flahaut vient à ma porte et fait prendre des nouvelles de ma santé. Elle ne veut pas monter, bien que son mari et son neveu soient avec elle. Je vais chez Mme de Chastellux où nous prenons le thé ; la duchesse forme avec nous un trio. Je rends visite à Mme de Nadaillac qui a été malade. Nous parlons de sa maladie, puis de religion ; elle désire savoir si je suis vertueux comme un Américain ; elle en doute, car elle