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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

mes informations et la force de mes raisons le surprennent également. Je le vois à ses manières.


20 mars. — Passé la soirée au Louvre. Plusieurs personnes entrent et sortent. Finalement nous allons par bandes voir les illuminations en l’honneur de la guérison du roi. La nuit est terrible ; le vent est très violent, et vient de l’ouest, chargé de pluie. Les illuminations ont été les plus simples, les plus mesquines que l’on puisse imaginer. M. de Sainte-Foy vient entre dix et onze heures nous dire que le Pape a placé le royaume en interdit. Cela produira une effervescence, dès qu’on le saura. La duchesse d’Orléans, avec qui je dîne aujourd’hui, a la bonté de me reprocher mes absences. Après le dîner, visite à Mme de Nadaillac. Son accueil est celui d’une coquette plutôt que d’une dévote.


25 mars. — Impossible de travailler chez moi aujourd’hui, mes domestiques voulant nettoyer mes chambres pour une réception. Je vais donc chez Mme de Flahaut. Les domestiques n’étant pas là, je m’annonce moi-même. Elle est en tête-à-tête avec M. de Ricey. Elle s’écrie tout à coup d’un ton alarmé : « Qui est-ce là ? » Quand je me suis nommé : « Je vais vous renvoyer tout de suite. » Je me retourne et je les quitte. J’ai chez moi à dîner Mmes de La Fayette, de Ségur, de Beaumont et Fézensac. Parmi les hommes se trouve l’abbé Delille. Je dis à Short, l’un des invités, qu’il n’a que peu de chances d’être nommé ministre en France ; Jefferson désire le voir retourner en Amérique, et la nomination est entièrement aux mains de Washington ; on doit la faire pendant cette session. Je lui montre le mémoire et les notes que j’ai rédigés à propos du tabac. Parlant des faits et gestes de l’Assemblée sur cette question, il dit que le duc de La Rochefoucauld est mené par Rœderer et Condorcet, qui