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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

Foucauld, M. Fauchet lit une excellente comédie de sa composition. Bouinville est là. Je le ramène chez lui, et en route il se plaint de l’ingratitude de Duportail envers La Fayette. Il dit que Montmorin était très abattu ce matin. Je lui répète ce que j’avais dit à Montmorin : il faut que la situation empire encore avant de pouvoir être améliorée. Le temps s’est adouci, mais pendant ma promenade de ce matin, j’ai remarqué que les vignes avaient souffert de la gelée. On dit à table qu’il n’y a pas eu de dégâts en pleine campagne, à cause du vent. M. Brémond vient me voir et je lui dis que j’espère obtenir l’argent nécessaire pour les rations. Il m’informe que les chefs jacobins doivent l’employer à faire un choix d’articles constitutionnels, et aussi le consulter sur les moyens de rétablir l’ordre. Je fais une visite à Mme de Ségur ; elle me raconte ce qu’on dit dans les salons, et c’est bien près de la vérité. Voilà comment on garde les secrets à cette cour.


15 mai. — Mme de Flahaut me dit qu’elle espère être bientôt nommée première dame d’honneur de la reine, qui gardera l’éducation de sa fille. Le dauphin doit être confié aux soins d’un homme. C’est à cela, je crois, que vise Montmorin, car il m’a dit qu’il accepterait un emploi dans la maison du roi. Je dîne chez M. de Montmorin et je lui communique ce que j’ai appris de M. Toulongeon chez Mme de Guibert, savoir, que les coloniaux sont battus dans leur projet d’exclure complètement du gouvernement les mulâtres. Cela causera parmi eux une grande effervescence. Je ne me plais pas du tout ici. Après le diner, j’ai avec lui une conversation particulière. Il me fixe mardi prochain pour une entrevue avec Du Port au sujet des rations, mais il exprime la crainte que l’Assemblée ne refuse son consentement. Je lui dis que, puisqu’il quitte les Affaires étrangères, il devrait s’assurer la liste civile, qui est la seule source réelle d’autorité. Il se dit incapable de diriger des