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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

d’Orléans s’arrangera à l’amiable. Je laisse Mme de Nadaillac avec l’abbé Maury et l’évêque de Condom. J’apprends que les députés des Antilles ont quitté l’Assemblée, et qu’un décret est intervenu interdisant la réélection des députés actuels. Je suis enchanté de ces deux faits, car les députés des Antilles ont jusqu’ici recouru aux moyens extrêmes pour se rendre populaires et faire adopter les mesures qui leur tenaient au cœur ; indifférents au bonheur de la France, ils ont beaucoup contribué aux malheurs survenus. Je soupe avec Mme de Foucauld, chez qui il y a une foule d’invités. Bouinville, qui est là, a l’air d’un amoureux, et, tandis que je le ramène chez lui, il avoue qu’il l’était, mais il n’a pas été heureux. Je dis à Mme de Foucauld que j’essaierai de la voir à Spa. Elle en est ravie, moins par intérêt pour moi que pour le sacrifice à ses charmes que signifierait cette démarche.


17 mai. — Comme c’est convenu, je vais à une heure chez M. de Montmorin, et j’y rencontre M. Du Port. Je découvre que M. de Montmorin est, ou du moins paraît, peu incliné à s’engager dans l’affaire des rations. Il dit qu’il doute beaucoup du succès, et que le roi éprouve une grande répugnance. Il m’avait dit auparavant que Sa Majesté était bien disposée ; ceci me semble mystérieux. Il ajoute que l’on redoute surtout d’être découvert. Il désire me revoir dimanche. Je lui réponds que je viendrai, mais sans répondre de la patience des intéressés. Il réplique que ceux-ci pourront faire ce qu’ils voudront. Je répète que la chose se fera malgré toute opposition de sa part. Ce que nous demandons est raisonnable, tandis qu’il est un homme étrange et indécis. Du Port paraît mieux disposé pour l’opération. Je vois Brémond et je lui dis que l’affaire des rations est retardée à samedi. Il en est très mécontent. Je rends visite à Mme de Ségur, et la conversation étant tombée sur les moyens de sauver les fortunes dans les troubles que l’on