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année 1792

Lettre à Washington.

4 février. — Cher monsieur, je vous ai écrit le 27 décembre, mais il y avait beaucoup de choses que j’avais omises ; je vais maintenant en parler. À la fin de la session de l’Assemblée nationale, une coalition eut lieu entre les Jacobins et les Quatre-vingt-neuf. Il est nécessaire d’expliquer ces termes. Les Jacobins, ainsi appelés parce qu’ils se réunissaient dans un couvent ou une église de ce nom, formaient alors le parti violent ; les autres, qui ont emprunté leur nom à un club fondé en 1789, étaient de soi-disant modérés. La mort de Mirabeau (qui fut, sans aucun doute possible, l’une des plus abominables canailles ayant jamais vécu) laissa un grand vide chez ces derniers. Il était alors vendu à la Cour, et voulait ramener le pouvoir absolu.

Les chefs des Jacobins étaient violents pour deux raisons : d’abord, parce que les Quatre-vingt-neuf ne voulaient pas d’une union sérieuse et cordiale avec eux, — de sorte que, incapables de marcher seuls, ils furent obligés de recourir à la populace et, par conséquent, de lui faire des sacrifices ; et secondement, parce que les objets de leurs désirs étaient plus grands, bien que plus éloignés, que ceux du premier parti. Ces derniers n’avaient jamais cherché dans la Révolution que des places confortables pour eux-mêmes, tandis qu’au début les Jacobins désiraient réellement établir une constitution libre, dans l’espoir que tôt ou tard ils auraient le pouvoir.

Vous remarquerez que les aristocrates étaient réduits à l’impuissance avant la division de leurs adversaires. Vous vous rappellerez que la première Assemblée avait décrété que ses membres ne pourraient accepter de la Couronne aucun