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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

Mme de Flahaut. Elle est encore souffrante, mais elle soupe, et, comme il fallait s’y attendre, elle est beaucoup plus malade après. L’apaisement commence à se faire aux États généraux ; c’est ce que j’apprends, au Salon, de l’évêque d’Autun, qui est un ami intime de Mme de Flahaut. Cet homme me paraît fin, rusé, ambitieux et méchant. Je ne sais pourquoi je tire, dans mon esprit, des conclusions aussi défavorables, mais c’est un fait, et je n’y puis rien.


10 juin. — Je pars à trois heures pour Versailles et je rends visite à quelques amis, entre autres à Mme d’Angivillers et à Mme de Tessé. La première est aussi furieuse des présomptions du tiers que la seconde l’est de la morgue de la noblesse ; elles ont toutes les deux également raison et tort. Il y a ici deux sœurs, dont les regards langoureux montrent qu’elles prêtent volontiers l’oreille aux propos galants, mais je ne les connais pas. Je me rends chez Mme de Flahaut. Elle est trop souffrante pour sortir ce soir. Nous bavardons assez longtemps, et elle me dit que je plais beaucoup aux Français ; c’est un très grand compliment pour un étranger, mais je crains vraiment de ne pas le mériter.


11 juin. — Ce matin, j’ai été au Raincy, chez la duchesse d’Orléans. J’arrive à onze heures, mais personne n’est encore visible. Bientôt la duchesse apparaît, et me dit qu’elle a informé Mme de Chastellux de ma venue. Le déjeuner n’est prêt que vers midi, mais comme j’avais mangé avant de partir, je n’en ressens que peu d’inconvénient. Après le déjeuner, nous allons entendre la messe à la chapelle. Dans la tribune, nous avons un évêque, un abbé, la duchesse, ses filles d’honneur et quelques amies. Mme de Chastellux est agenouillée en bas. Nous nous amusons des tours joués par M. de Ségur et M. de Cubières