Page:Journal de Marie Lenéru.djvu/358

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
294
JOURNAL DE MARIE LENÉRU

et où tout est à faire, à créer, en commençant par la poste — « de l’influence de l’amour sur les communications postales » — les routes, les foires, l’industrie du coton, les parcs d’autruches, la politique de races, la justice à rendre à la porte de sa tente, comme un Louis IX aux croisades. Tous les peuples affluant vers nous : ana madeleum, je suis opprimé. Voyager des mois, connaître à cheval toutes les heures du jour et de la nuit, à la tête de ses gardes et de ses chameaux qui suivent. Quand la saine envie vous prend d’un bon temps de galop, tourner la tête et voir les rayons du soleil levant éclairer votre fanion tricolore.

Mais ce n’est pas sans un sentiment de dépossession que j’admire cette œuvre des coloniaux. Je n’oublie pas que du temps de mon grand-père et même de mon père, les colonies dépendaient de la marine, les amiraux étaient leurs gouverneurs, après avoir été leurs conquérants. Quand grand-père commandait la station de l’Atlantique, il commandait l’Afrique, mais les colonies étaient alors des côtes et des îles…

J’en reviens à Moll fiancé, n’est-ce pas plus émouvant que n’importe quoi de dire à une femme : « Je vais vous envoyer copie de tous les ordres et de toutes les instructions que je vais donner. J’agis toujours avec la même coquetterie que si vous étiez là ».

Certes ce qui le touche, ce qui l’ébranle le plus, c’est l’amour amitié, l’amour mariage, qui n’a besoin