Page:Journal de physique théorique et appliquée, tome 5, 1896.djvu/357

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assez commode pour savoir si, dans tel ou tel cas, on aura ou on n’aura pas de décharge.

À la condition de faire quelques hypothèses, on pourra pénétrer plus avant dans la nature probable du phénomène. On pourra supposer que l’altération subie par un gaz le long d’un rayon de Röntgen consiste en ceci : que des charges positives et négatives sont développées en quantités égales, tout le long du rayon. En l’absence de tout champ électrique, l’ensemble de ces charges constitue un fluide neutre se diffusant de proche en proche avec une vitesse inconnue, mais faible. Si, au contraire, il existe un champ électrique, les charges positives acquerront une vitesse moyenne plus grande dans la direction de la force électrique, les charges négatives, une vitesse plus grande dans la direction opposée. Le résultat final sera que les deux systèmes filtreront l’un au travers de l’autre le long des tubes de force, jusqu’à ce qu’ils rencontrent des charges de nom contraire ou un obstacle mécanique, tel qu’un solide ou un liquide. La façon dont l’électricité s’écoulerait le long des tubes de force différerait ainsi profondément de l’électrolyse ordinaire et de la diffusion proprement dite.

IX. Au point de vue qualitatif, on sait donc dans quel cas les rayons X provoquent la décharge. Il reste, au point de vue quantitatif, à donner un moyen pour trouver, dans chaque cas, la valeur du débit.

Je pense qu’on peut y arriver en remarquant que, si de l’électricité neutre est dissociée le long d’un rayon X, il doit être possible de la mesurer et de vérifier que, pour un rayonnement donné, c’est une constante indépendante du champ électrique qui permet de la déceler, et capable de caractériser ce rayonnement. Je crois avoir réussi à faire cette mesure et à vérifier cette constance, et je rendrai compte ultérieurement des expériences que j’ai tentées dans ce sens.

Enfin, il pourra être intéressant, à la condition qu’on s’aperçoive qu’on fait de nouvelles hypothèses, d’exprimer la théorie qui précède en disant que, sur leur passage, les rayons de Röntgen brisent certaines molécules en morceaux, en ions, qui, suivant un postulat fondamental de la théorie des ions, sont électrisés par le fait même de leur séparation, et qui chemineraient dans un champ électrique suivant le mécanisme précédemment décrit. Grâce à cette nouvelle illustration, on pourra prévoir que ces gaz chargés d’ions seront chimiquement plus actifs que des gaz non soumis à l’action des rayons de Röntgen.