Page:Journal des économistes, 1848, T20.djvu/172

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nière, la peur de la réforme douanière leur a fait applaudir la mesure, oubliant que la veille ils invoquaient contre l’organisation du travail ces arguments de la science qu’ils conspuaient l’avant-veille, en haine du libre-échange. La Liberté, journal dans lequel M. Alexandre Dumas fait je ne sais quelle politique, et quelle économie politique, nous avons lu un véritable barbouillage inintelligible, d’où il résulte clair comme le jour que l’auteur de l’article aurait besoin de lire quelque chose comme le Catéchisme d’économie politique. Enfin le Charivari… Mais le Charivari a été spirituel. Sous ce rapport, il doit lui être beaucoup pardonné, d’autant plus, que nous l’avons souvent trouvé (lorsque M. Altaroche n’était pas absent) en parfait bon sens. Voyez, par exemple, son article sur l’égalité des salaires, que nous avons reproduit dans notre dernier numéro… Donc un collaborateur du Charivari s’est amusé aux dépens des économistes, et assez drôlement, nous l’avouons, pour nous faire rire bien franchement. Toutefois, nous devons avertir notre confrère qu’il a commis force erreurs. Il croit, par exemple, qu’Owen, le type des communistes, est économiste au premier chef, comme Smith, Say et Ricardo ; il n’a pas compris ce qu’il y avait précisément de charivarique dans la création de cinq chaires pour en supprimer une ; il a confondu les signataires de l’adresse avec des économistes vraiment semblables à ceux qu’il dépeint ; il a enfin supposé, pour utiliser son trait final, que chacun d’eux pouvait craindre pour sa chaire, lorsqu’un seul d’entre eux est professeur d’économie politique (id est orfèvre), ailleurs que dans une Faculté dépendant de M. le ministre de l’instruction publique. Supposons maintenant toutes ces erreurs redressées, l’article était impossible, ou plutôt il n’y avait de possible pour le Charivari qu’un article à l’adresse de la haute Commission faisant ce rapport, cette note et ce programme que vous savez. Sic vos non vobis.

— La Revue nationale, qui pense être plus chrétienne que nous, et qui se croit obligée de se dire anti-économiste, a fait une critique très-sensée des changements apportés au collége de France. À ses yeux, cette institution doit être consacrée non pas tant à la vulgarisation des vérités acquises aux sciences qu’à l’examen transcendantal des doctrines et des théories qui sont l’expression de toutes les tentatives, de toutes les hardiesses de l’esprit d’innovation.

L’enseignement du collége de France, dit le journal que nous citons, doit différer complètement de l’enseignement des colléges et des Facultés. Il ne s’adresse plus, en effet, comme celui-ci, à des jeunes gens qu’il faut initier à une science qu’ils ignorent et que le professeur doit exposer graduellement, méthodiquement et dans une limite déterminée par les besoins de ceux qui l’écoutent. Il s’adresse à des hommes qui savent déjà, et qui ont moins pour but d’apprendre une connaissance à laquelle ils sont étrangers que de vérifier celle qu’ils possèdent, et de la voir présentée sous des points de vue nouveaux et développée sous tous ses aspects. Si ces considérations sont vraies, et nous ne voyons guère comment on en contesterait la justesse, il faut reconnaître que le décret du ministre de l’instruction publique, en date du 7 avril, paraît devoir apporter une grave perturbation dans la constitution du collége de France et dans l’esprit de son enseignement. D’après cet arrêté, les élèves de l’école administrative viendraient puiser au collége de France l’instruction qui leur est imposée, et les professeurs devraient, en conséquence, approprier leurs leçons aux besoins de cette portion permanente de leur auditoire. Nous