Page:Journal des économistes, 1848, T20.djvu/171

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lier. Nous reproduisons, dans notre premier article, les énergiques paroles par lesquelles M. Léon Faucher a appuyé la présentation de cette adresse, les observations probantes dont M. de Tracy les a fait suivre, et enfin la réponse officielle que le Moniteur a mise dans la bouche de M. de Lamartine. La députation de la Société d’économie politique, qui s’est rendue, dimanche matin 23, à l’hôtel des affaires étrangères, et qui a été reçue avec une cordialité très-marquée par l’honorable membre du gouvernement provisoire, nous a positivement assuré que le Moniteur était inexactement informé, et que personne ne comprenait mieux que M. de Lamartine l’utilité des études économiques en tout temps, et surtout sous le régime populaire que la révolution de Février a inauguré.

La presse a donné une grande publicité à l’adresse de la Société d’économie politique. Cette publicité sera le châtiment des hommes qui ont inspiré la mesure de M. Carnot. L’opinion du monde savant, en France et en Europe, fera justice de cette attaque contre les idées libérales. Un jour, lorsque l’histoire saura gré à M. Guizot lui-même du rétablissement de l’Académie des sciences morales et politiques, on aura quelque peine à comprendre qu’après une révolution qui a renversé cet homme d’État au nom des idées libérales, un ministre de l’instruction publique ait pu proscrire, le jour même de la révolution, l’enseignement de l’une des plus indispensables des sciences morales.

La presse parisienne a publié, avons-nous dit, l’adresse de la Société d’économie politique ; mais ses organes, sauf quelques exceptions, n’ont point élevé la voix contre cet acte de véritable barbarie. Pourquoi ? Simplement par ignorance. Les uns n’ont vu, dans la suppression du cours d’économie politique, ni plus ni moins que la suppression du cours de turc ou d’éloquence latine ; les autres ont cru que cinq chaires de technologie remplaceraient et au delà une chaire d’économie politique ; ceux-ci, organes d’un socialisme quelconque, formulé ou à formuler, ont été bien aises de voir fermer une tribune où on pouvait passer les utopies au crible de la discussion ; ceux-là, se figurant que l’économie politique change de base avec chaque forme de gouvernement, ont positivement cru qu’avec la république il y avait lieu de changer les professeurs nommés en monarchie, tout comme on a changé les préfets et les procureurs du roi.

Il n’en a pas été de même dans les départements, d’où sont parties de nombreuses protestations contre la mesure rétrograde de M. Carnot.

Dans toutes ces nuances d’écrivains, parfaitement ignorants de ce dont ils parlent, il y en a quelques-uns que nous voulons citer pour montrer précisément jusqu’où va de nos jours la présomption en matière d’économie sociale. Dans la vraie République, par le citoyen Thoré, il a été dit que la suppression de la chaire du collége de France avait été bien dûment prononcée, parce que l’économie politique est une science morte. Mais le citoyen Thoré n’a pas pris garde que, lorsqu’il fait par hasard lui-même de cette science, il est dans le sens commun, ce qui, au reste, ne lui arrive pas souvent. Nous parlons de l’économie politique vraie du citoyen Thoré, et non de sa politique que nous ne voulons pas juger, et non de sa critique artistique dans laquelle il est, dit-on, passé maître. Dans une autre République, par M. Dareste, la science a reçu un autre coup de pied de même espèce. Dans le Représentant du peuple, socialiste sui generis, l’économie politique est une science à faire… par lui sans doute. Dans le Moniteur industriel et quelques autres organes de la prohibition doua-