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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/13

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décompositions. C’est de quoi, voici trente ans, le théâtre était menacé. Décomposition d’une convention qui avait fait jusque-là sa noblesse, raréfaction ou indifférence des spectateurs et indifférence aussi des pouvoirs publics. Le théâtre n’est prospère que dans la contrainte ou la protection : il macérait dans cette indifférence.

Issue du réalisme poétique du moyen âge où fleurissait cependant, par le sentiment religieux, par l’allégorie et le symbole, une vraie poésie dramatique, la convention théâtrale, cet accord, ce consentement harmonieux et équilibré entre un public, des acteurs et des auteurs, avait atteint au xviie siècle un point de perfection et de pureté que l’on n’a jamais retrouvé. Cette convention s’exprimait par un rapport spirituel unique entre une écriture et une exécution qui nous servent encore d’exemples.

Puis, peu à peu, elle décroît dans une série d’évolutions où le théâtre reflète ces époques successives dans lesquelles Marivaux et Voltaire, Beaumarchais puis Hugo, Musset, Alexandre Dumas, Émile Augier, enfin Eugène Manuel, font avec le public une conversation dont les sentiments, les idées et le langage s’infléchissent de plus en plus, jusqu’au dialogue de Zola et d’Oscar Méténier, jusqu’à ce naturalisme qui a trouvé son expression exacte dans le théâtre qui nous a précédés et qui s’intitulait : Théâtre Libre.

Curieuse époque, éprise de sciences exactes, soucieuse de vérités démontrables et vérifiables, qui décou-