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VISIONS DE L’INDE

larges yeux, sa beauté hardie et conquérante, lui attiraient la sympathie des hommes et des femmes ; et, lorsqu’il les regardait, les choses elles-mêmes frémissaient ! Il dansait aux applaudissements des gaupis et, dans leurs bras caressants, il leur obéissait, — le livre sacré l’affirme, — « comme une poupée de cire ». Il savait aussi se montrer indisciplinable à ses heures… Le voyez-vous retenant de ses petites mains hardies les cornes des vaches ses nourrices ! Il lâchait les veaux à contre-temps, riait de leur impatience… Ah ! ici, il dérobe avec des raffinements de ruse+e lait et la crème pour les partager avec ses camarades, les singes… Celui-ci lui a refusé et, de colère, le dieu brise le vase ! Il grimpe sur les meubles, troue les seaux de lait suspendus afin de mieux y boire. Il est non seulement précoce en espièglerie mais en miracle : Dans cette maison sombre, il entre couvert de pierreries ; il devient ainsi une lampe qui marche, et il illumine lui-même les objets qu’il va saisir. »

Cette fille de Muttra me racontait, comme des événements familiers, les épisodes de cette vie légendaire ; et je me plaisais à croire qu’en ce jeune corps avait pu renaître l’âme d’une de Ces bergères que le Héros chérissait. Dans cette cour fraîche de temple, où rien de profane ni de moderne ne se glissait, je pouvais me croire retourné à bien des