Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/362

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
348
VISIONS DE L’INDE

Vite, la lampe est rallumée et nous cherchons.

Combien de fois, dans les jardins, autour de cette maison ouverte, j’ai cru entendre glisser l’ennemi. Mais, jusqu’ici, je ne l’ai aperçu qu’empaillé dans les musées ou, édenté et flasque, servant aux exercices des fakirs. Son idée, son image me hantaient pourtant sans cesse, en ce pays qui est le sien, qu’il a créé à sa ressemblance…

L’Inde répète le serpent partout : dans la souplesse onduleuse du corps des femmes, dans les yeux brillants et humides des mendiants sacrés, dans l’âme même de l’indigène, fuyante, peureuse, puis tout à coup frénétique et sifflante avec un dard de haine…

J’ai suivi le conseil de ne jamais marcher pieds nus dans ma chambre ; toujours, avant de m’endormir, j’ai regardé au fond des draps où le cobra aime à se chaudement pelotonner…

Cette fois, nous allons nous rencontrer. Et j’ai un frisson à songer que, cette nuit, il est là, le dieu qui rampe, décidé enfin, contre mon gré d’ailleurs, à me rendre visite. Il peut me foudroyer d’une piqûre, pour un geste maladroit qui l’atteindrait… Tous les remèdes sont à peu près vains, sauf le sérum du docteur Calmettes, très employé dans l’Inde… El je n’ai aucune pharmacie à ma portée.

— Sâb, dit Rozian, qui, armé d’un bâton, soulève