Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/365

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
351
VISIONS DE L’INDE

Les fenêtres du toit pâlissent. L’aube vient ; je respire, il me semble que le danger est écarté.

Je cours au cabinet de toilette, je m’ondoie avec joie après cette nuit blanche aux sueurs fiévreuses. À peine suis-je séché que Rozian accourt.

Sa mine est plus repliée que de coutume, il a même l’air affreusement dissimulé. Je sens qu’il va me traiter en « blanc », en ennemi que l’on redoute et que l’on trompe. Je ne sais quoi de rétracté le fige. L’abîme qui sépare les races s’accentue entre nous. Que me prépare-t-il ?

— Sâb, vous voulez tuer le cobra ?

— D’abord, je voudrais le trouver, Rozian… Cela me semble aussi difficile qu’indispensable.

— Vous voulez donc le tuer, Sâb ?

— Pourquoi pas, Rozian ?

Rozian se tait.


Je l’observe, il apparaît de plus en plus faux et fermé, ses paupières sont baissées. Je vois bien que je n’en tirerai rien, si je n’entre pas dans ses idées.

— Tu ne tuerais pas le cobra, toi, mon boy ?

— Sàb, ce n’est pas bien de tuer les animaux…

— Tu n’as pas cependant les superstitions des Hindous, étant musulman…

— Ça ne fait rien, Sâb, le serpent est sacré.

— Mais, si tu ne le tues pas, il te tuera.