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questions : c’est d’admettre que notre esprit ne débute pas par des généralités et des abstractions et de chercher, au contraire, l’origine de nos connaissances dans un ou plusieurs actes concrets et singuliers, par lesquels la pensée se constitue elle-même en saisissant immédiatement la réalité. Ou notre science tout entière n’est qu’un rêve, ou les principes sur lesquels elle est fondée sont à leur tour l’expression d’un fait, qui est le fait même de l’existence de la pensée : c’est donc dans ce fait, et non dans un axiome primitif, que nous devons essayer de résoudre le principe sur lequel repose l’induction.

Reste à savoir maintenant en quoi consiste cette première démarche par laquelle la pensée entre en commerce avec la réalité ; et nous ne pouvons, ce semble, nous la représenter que de deux manières, puisque la philosophie contemporaine n’admet que deux définitions de la réalité elle-même. Ou, en effet, la réalité consiste exclusivement dans les phénomènes, et toute connaissance est, en dernière analyse, une sensation : où bien la réalité est, en quelque sorte, partagée entre les phénomènes et certaines entités inaccessibles à nos sens, et, dans ce cas, la connaissance humaine doit débuter à la fois par l’intuition sensible des phénomènes et par une sorte d’intuition intellectuelle de ces entités. Nous partirons donc tour à tour, pour démontrer le principe de l’induc-