Chêne-Parlant est secoué par une force formidable, Simon est entouré par la langue de feu d’un volcan. Un obus de gros calibre a coupé la branche sur laquelle il est juché, a explosé, et quand la fumée se dissipe, Simon, inanimé, lancé comme un fétu, est accroché à une fourche du chêne, les jambes prises comme dans un étau, pendant d’un côté, la tête de l’autre… Quelques flammèches de l’écorce qui a pris feu se détachent et tombent autour de lui, étincelles rougeoyantes qui s’éteignent en touchant la terre.
Le drame a duré deux secondes.
Pourtant il a été vu…
Il a été vu par des tirailleurs allemands, à huit cents mètres… et parce qu’ils ont peur, sans doute, que l’arbre ne cache d’autres Français, pendant cinq minutes des salves viennent torturer les feuilles, casser les menues branches, en traverser d’autres, et, peu à peu, s’écroule sur le corps plié de l’officier toute une verdure de feuillage, pareil aux fleurs que des mains pieuses jettent sur les tombes.
Il a été vu également par les dragons de Lafosse.
Et ils ont poussé un cri de douleur et de colère…
Enfin, il a été aperçu par Norbert qui, au même moment, à la lisière du bois et jumelle aux yeux, s’orientait vers la ferme de Saint-Léger, point du rendez-vous, et venait, dans le Chêne-Parlant, de découvrir la silhouette de Simon.
Norbert avait vu l’explosion, le brusque enveloppement des flammes autour de l’arbre, et, tout à coup, l’officier projeté en l’air de son poste d’observation, retomber dans l’immobilité de la mort.
Son cœur se serre, dans une vive émotion…
— Ah ! mon Dieu !
Il ne plaint pas cette fin tragique… elle est celle d’un soldat.
Mais une hésitation lui vient, quelque chose comme un remords.