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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Le soir, quand elles revenaient à leur refuge, souvent grelottantes de fièvre à force d’avoir reçu de la pluie et n’ayant même pas le courage de toucher à leur maigre pitance, elles se couchaient l’une contre l’autre essayant ainsi de se réchauffer.

Dans ces crises terribles de faiblesse, centuplées par le désespoir de leur abandon, c’était Rolande, maintenant, qui montrait le plus d’énergie.

Rose-Lys eut des accès de délire.

Et dans ses crises, des phrases lui échappaient, incohérentes, qui réunissaient des idées étranges et sans suite, et qui ressemblaient à de la folie.

Mais d’autres étaient plus claires, prouvaient chez elle une pensée fixe qui la hantait, dans ce délire, comme elle devait la poursuivre à son réveil.

Et parmi celles-ci, un nom… un nom si doux au cœur de Rolande et qui était bien doux en passant sur les lèvres de Rose-Lys… un nom qu’elle redisait avec des inflexions de voix tremblantes qui étaient voisines du sanglot.

— Simon… mon cher Simon !

Cette nuit-là, quand Rolande comprit, elle fut prise d’un grand trouble.

— Elle aussi l’aimait !… Elle aussi, elle l’aime !…

Pourtant l’intimité de vie de Rolande et de Simon avait été si complète, depuis la jeunesse et depuis l’enfance, que Rose-Lys ne devait pas ignorer leur amour et le projet de mariage, malgré tout, avait été connu dans le paya, avant la guerre. Ce projet correspondait si bien à cette amitié des deux jeunes gens que, depuis longtemps, les gens les avaient mariés, alors que Jean-Louis ne s’était pas encore décidé à sa démarche auprès du comte de Chambry.

— Et malgré cela, murmurait Rolande profondément émue, malgré cela, elle s’est dévouée à moi comme si j’étais une sœur…