Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/370

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de l’Europe où il faut disputer pour savoir dans quel coin de terre on mettra pourrir un cadavre. C’est encore une des difficultés que le concordat autrichien vient de créer pour les quarante millions d’hommes qui appartiennent à l’empire d’Autriche, et sur lesquels il n’y a pas plus de trente millions de catholiques.

Grâce à Dieu, la loi française a tout réglé et tout prévu jusque dans les plus petits détails. Mais ce qui n’est plus dans la loi peut être resté dans les mœurs. En général, le clergé français est très-prudent et très-réservé dans ces matières ; il n’y a, pour ainsi dire, pas d’exemples de difficultés élevées par lui dans ces dernières années au sujet des mariages mixtes. Sur un point qui, je le crois, est tout de discipline et n’intéresse pas essentiellement le dogme, notre clergé se montre assez difficile, et, tandis qu’on marie journellement un protestant à une catholique sans rien exiger du protestant, on exige d’un homme élevé dans la religion catholique, mais qui se déclare incrédule, la formalité de la confession auriculaire. J’avoue que le sacrement de la pénitence n’étant constitué que par l’absolution reçue à la suite de la confession, une simple confession sans absolution n’est pas une profanation du sacrement, un sacrilège proprement dit ; mais le mariage n’est-il pas aussi un sacrement ? Si la bénédiction nuptiale est donnée seulement à la femme, pourquoi exiger la confession du mari ? Et si elle est donnée en même temps au mari, il reçoit donc un sacrement sans être en état de grâce, sans croire à l’efficacité du sacrement qu’il reçoit, à la mission du prêtre qui le lui confère et à la divinité de la religion qui l’a institué ? Certes, puisque la bénédiction religieuse n’entraîne aucune conséquence civile, l’Église a le droit rigoureux d’imposer ses conditions à ceux qui la lui demandent. Il y a pourtant une différence qu’elle devrait reconnaître entre l’acceptation de la bénédiction nuptiale, qui peut être considérée comme donnée seulement à la femme, et la confession auriculaire, qui est, en apparence du moins,