Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/241

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sensation et, après avoir inspiré la curiosité, commençait à inspirer la défiance.

Que j’aurais donc voulu être sur un navire, pendant une bataille navale, la hache d’abordage à la main, sous les boulets, loin des bagages !

Nous étions dans la rue, — ma mère d’un côté, moi de l’autre, mon père en éclaireur morne — quand M. Chanlaire vint par hasard ; il est notre providence décidément.

Il nous mena comme une bande de prisonniers dans un logement qu’il connaissait : je crois que des agents nous suivirent. Ils se demandaient ce que voulait cette famille.

Mon père n’avait pas voulu dire qui il était, l’auberge étant indigne de sa situation, et il planait du mystère sur nos têtes.


Mon père est entré en fonctions le lendemain même de notre emménagement, et il a fait peur aux élèves, tout de suite : cela lui garantit la tranquillité dans sa classe, pour toujours, et des leçons particulières, en quantité. — Il a l’air si chien, — on prendra des répétitions !

Tout va bien ! — Voyons maintenant la ville !

Toutes mes illusions sur l’Océan, envolées ; tous mes rêves de tempêtes tombés dans l’eau douce, car c’était de l’eau douce !

Point de vaisseaux avec les canons qui tendent la gueule, et des officiers à chapeau de commandement ; point de salves d’artillerie ni de manœuvres de