Page:Julien empereur - Oeuvres completes (trad. Talbot), 1863.djvu/22

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de moyenne taille ; il avait les cheveux lisses, les yeux beaux et brillants, les sourcils bien dessinés, le nez droit, la bouche un peu grande, la lèvre inférieure proéminente, les épaules larges et la poitrine bien développée. Eusèbe et les eunuques qui dirigeaient la volonté molle et incertaine de Constance, lui font donner à Gallus le titre de César, et, afin de cimenter cette alliance politique, on marie le jeune prince à Constantine, sœur de l’empereur et veuve d’Annibalien. C’était, à en croire quelques historiens, une furie altérée de sang. Gallus ne l’éprouva que trop. Envoyé en Orient contre les Perses, pendant que l’empereur marchait contre Magnence, il trouva dans Constantine un mauvais génie, dont les passions impétueuses le poussèrent à des entreprises sanglantes ou suspectes qui flattaient et entretenaient sa violence, mais qui écrasèrent sa faiblesse. Sa femme morte, il ne sut plus comment sortir du dédale où elle l’avait engagé. Considéré comme rebelle par l’empereur et par ses ministres, Eusèbe, Pentadius et Mellobaudes, il eut la tête tranchée près du lieu où avait péri, vingt-huit ans auparavant, Crispus, fils de Constantin[1].

Durant ces scènes lugubres, que devenait Julien ? Une femme avait perdu son frère, une femme le sauvait. Constance, veuf de la fille de Galla, avait épousé en secondes noces une jeune Macédonienne[2] de distinction, Eusébie, à l’esprit et à la beauté de laquelle tous les historiens ont rendu justice. Mue par la pitié ou par un sentiment plus tendre, Eusébie prend Julien sous sa protection, déjoue les intrigues des eunuques, qui essayent de l’envelopper dans la conspiration de Gallus, et finit par obtenir grâce pour lui. La popularité que Julien s’était faite à Constantinople, en fréquentant les écoles dès philosophes et des rhéteurs, avait déterminé Constance à l’éloigner de la capitale de l’empire. Sous la direction du grammairien Nicoclès et du rhéteur Écébole, on l’avait renvoyé à Nicomédie ou en tel heu de l’Asie qu’il choisirait. Il avait choisi Nicomédie. Libanius y enseignait alors ; mais, comme Libanius était païen, Constance exigea que Julien ne suivît point ses leçons. Julien obéit : il n’alla pas entendre l’illustre rhéteur, mais il dévora secrètement ses ouvrages : nourriture dangereuse pour un jeune homme, dont

  1. Pola en Istrie ou Flanona en Dalmatie.
  2. Elle était de Thessalonique : c’est par inadvertance que nous avons écrit Pella à la page 94.