Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/50

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nous ménageait pas, mais nous étions fort pacifiques.

Tout récemment, j’eus l’occasion de retracer le passé de La Vogue ; deux jeunes poètes, Tristan Klingsor et Henry Degron, me demandèrent l’autorisation d’arborer mon vieux titre sur une jeune revue qui devait se conformer, m’affirmait-on, aux traditions intransigeantes de l’ancienne Vogue. Je leur donnai une lettre-préface, on pourrait dire, étant donné l’épigraphe, « Vogue la Galère », auteur Jules Laforgue, parrain de la revue, des lettres de marque. Encore une fois, le petit steamer partit, chargé d’espoirs argonautiques, avec le salut amical de son ancien pilote. Le rôle grave de préfacier que j’avais assumé fait qu’il manque pourtant dans ces pages quelques détails que le côté d’apparat de ma besogne me commandait de passer sous silence. Et, d’abord, je n’y pouvais faire remarquer combien le titre, il est vrai, heureusement corrigé par l’épigraphe, était mauvais. C’est l’éloge de La Vogue et des œuvres qu’elle publia, dans sa première série, qu’on ne pensa jamais en citant son titre, devenu une sorte de nom propre, à la vulgarité du mot « vogue » conçu en son sens ordinaire, et à tout ce qu’il indique de plate poursuite du succès courant, et de course à quatre pattes vers la vulgarité. Le titre avait été trouvé par M. Léo d’Orfer, un décadent qui avait fondé cette revue et m’en avait confié le secrétariat de la rédaction, à cause de sa foi en mon génie et surtout parce qu’il me considérait très apte, en cas de difficultés vitales, à assurer la vie de l’organe. M. Léo d’Orfer avait découvert, c’est trop peu dire, inventé un éditeur, M. Barbou, venu à Paris pour y acquérir un fonds de papeterie au