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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


l’on considère les événements et le monde même où ils se produisent (ainsi qu’il le faut aussi) comme de simples phénomènes, puisqu’un seul et même être agissant, d’un côté, a, comme phénomène (même devant son propre sens intime) une causalité dans le monde sensible, laquelle est toujours conforme au mécanisme de la nature, et, d’un autre côté, relativement à la même action, en tant qu’il se considère comme noumène (comme pure intelligence, comme existant d’une existence supérieure aux conditions du temps *[1]), peut contenir un principe de détermination pour cette causalité agissant d’après des lois de la nature, qui lui-même soit indépendant de toute loi de la nature.

Il en est de même de cette antinomie de la raison pure pratique. La première des deux propositions contraires, à savoir que la recherche du bonheur produit la vertu, est absolument fausse ; mais la seconde, à savoir que la vertu produit nécessairement le bonheur, n’est pas fausse absolument : elle ne l’est qu’en tant que je considère la vertu comme une forme de la causalité dans le monde sensible, et que, par conséquent, je regarde mon existence dans le monde sensible comme le seul mode d’existence de l’être raisonnable ; elle n’est donc fausse que sous une certaine condition. Mais, puisque je n’ai pas seulement le droit de concevoir mon existence comme un noumène dans un monde intelligible, mais que je trouve dans la loi morale un principe purement intellectuel de

  1. * in seinem nicht der Zeit nach bestimmbaren Dasein.