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DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.

détermination pour ma causalité (dans le monde sensible), il n’est pas impossible que la moralité de l’intention ait, comme cause, avec le bonheur, comme effet dans le monde sensible, une connexion nécessaire, sinon immédiate, du moins médiate (par le moyen d’un auteur intelligible du monde), tandis que, dans une nature qui serait purement sensible, cette connexion ne pourrait être qu’accidentelle, et, par conséquent, ne pourrait suffire au souverain bien.

Ainsi, malgré l’apparente contradiction de la raison pratique avec elle-même, le souverain bien, ce but nécessaire et suprême d’une volonté moralement déterminée, est un véritable objet de la volonté ; car il est pratiquement possible, et les maximes de la volonté, qui y trouvent leur matière, ont de la réalité objective. Cette réalité semblait d’abord compromise par l’antinomie qu’on trouvait dans la connexion qui existerait entre le bonheur et la moralité suivant une loi universelle ; mais cette antinomie résultait d’une simple méprise, qui consistait à prendre un rapport de phénomènes pour un rapport des choses en soi à ces phénomènes.

S’il est nécessaire de chercher de cette manière, c’est-à dire en remontant à un monde intelligible, la possibilité du souverain bien, de ce but proposé par la raison à tous les êtres raisonnables comme l’objet de tous leurs désirs moraux, on doit s’étonner que les philosophes de l’antiquité, comme ceux des temps modernes, aient pu trouver dans cette vie même (dans le monde sensible) une exacte proportion entre le bonheur et la vertu, ou