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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.




IX.


Que les facultés de connaître de l’homme sont sagement proportionnées à sa destination pratique.


Si la nature humaine est destinée à tendre au souverain bien, il faut aussi admettre que la mesure de ses facultés du connaître et particulièrement que le rapport de ces facultés entre elles est approprié à ce but. Or la critique de la raison pure spéculative prouve l’extrême insuffisance de cette faculté pour résoudre, d’une manière conforme au but auquel nous devons tendre, les importants problèmes qui lui sont proposés. Sans méconnaître les indications naturelles et précieuses qu’elle reçoit de cette même faculté, ainsi que les grands pas que celle-ci a pu faire pour se rapprocher de ce haut but qui lui est assigné, elle montre que par elle-même cette faculté ne peut atteindre ce but, même avec le secours de la plus grande connaissance possible de la nature. Il semble donc que la nature nous ait traités en marâtre, en rendant en nous insuffisante une faculté nécessaire à notre but.

Mais supposez qu’elle nous ait ici servis à notre souhait, et qu’elle nous ait donné en partage cette puissance d’esprit et ces lumières que nous voudrions bien posséder, ou dont quelques-uns se croient réellement en possession, qu’en résulterait-il suivant toute apparence ? À moins que toute notre nature ne fut changée en même temps, les penchants, qui ont toujours le premier mot réclameraient d’abord leur