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Page:Kant-Fondements de la métaphysique des moeurs, trad. Lachelier, 1904.djvu/164

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FONDEMENTS DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MŒURS.

raison voit reculer sans cesse le moment où elle pourra être satisfaite. C’est pourquoi elle cherche sans trêve ni repos le Nécessaire inconditionné et elle se voit forcée de l’admettre sans avoir aucun moyen de le comprendre ; heureuse si elle peut seulement découvrir un concept qui s’accorde avec cette hypothèse. Si donc nous n’avons pas réussi, dans notre déduction du principe suprême de la moralité, à rendre intelligible l’absolue nécessité d’une loi pratique inconditionnelle (tel que doit être l’impératif catégorique) nous ne méritons pour cela aucun blâme et c’est plutôt à la raison humaine en général qu’il faudrait adresser ces reproches. On ne peut en effet trouver mauvais que nous ne voulions pas expliquer ce principe par une condition, c’est-à-dire au moyen de quelque intérêt que nous lui donnerions pour base, car alors comme serait plus une loi morale, c’est-à-dire une loi suprême de la liberté. Il est vrai que de cette manière nous ne comprenons pas la nécessité pratique inconditionnelle de l’impératif moral, mais nous comprenons au moins qu’il ne peut être compris et c’est tout ce que l’on est en droit d’exiger d’une philosophie qui cherche à s’avancer jusqu’aux dernières limites de la raison humaine.