Page:Kant-Mélanges de Logique (trad. Tissot), 1862.pdf/356

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perte ; et comme il n’y a presque pas là de malheur, mais la faute d’un véritable orgueil, la liberté est perdue (étourdiment, verscherzet), dans le sens propre du mot.

Telle est la marche inévitable des choses. Le génie se complaît d’abord dans son audacieux élan, après avoir jeté le fil avec lequel la raison le conduisait autrefois. Bientôt il charme aussi les autres par des sentences impérieuses et de brillantes promesses ; il semble s’être enfin placé sur un trône qu’une raison tardive et pesante ornait si mal, sans toutefois cesser d’en tenir le langage. La maxime alors admise de l’impuissance d’une raison souverainement législatrice, nous l’appelons, nous autres hommes vulgaires, une extravagance ; mais pour ces favoris de la bonne nature, c’est de l'illumination. Cependant, comme une confusion de langage ne peut tarder à naître parmi eux, puisque la raison seule peut prescrire valablement pour tout le monde, et que chacun maintenant s’abandonne à son inspiration propre, de ces inspirations intérieures doivent alors finir par sortir des faits extérieurs garantis par des témoignages, de ces traditions, qui dans le commencement même étaient choisies, mais qui avec le temps sont devenues des enseignements obligatoires, doit sortir en un mot l’entier asservissement de la raison aux faits, c’est-à-dire la superstition, parce que la superstition