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L’ÉDUCATION ET LA DESTINATION DE L'INDIVIDU.


avoir d’uniformité parmi eux qu’autant qu’ils agissent d’après les mêmes principes et que ces principes deviennent pour eux comme une seconde nature. Nous pouvons du moins travailler au plan d’une éducation conforme au but qu’on doit se proposer, et laisser à la postérité des instructions qu’elle pourra réaliser peu à peu. Voyez, par exemple, les oreilles d’ours : quand on les tire du pied même de la plante, elles ont toutes la même couleur ; quand au contraire on en sème la graine, on obtient des couleurs toutes différentes et les plus variées. La nature a donc mis en elles certains germes, et il suffit, pour les y développer, de semer et de planter convenablement ces fleurs. Il en est de même chez l’homme.

Il y a beaucoup de germes dans l’humanité, et c’est à nous à développer proportionnellement nos dispositions naturelles, à donner à l’humanité tout son déploiement et à faire en sorte que nous remplissions notre destination. Les animaux remplissent la leur spontanément et sans la connaître. L’homme au contraire est obligé de chercher à atteindre la sienne, mais il ne peut le faire qu’autant qu’il en a une idée. L’accomplissement de cette destination est même entièrement impossible pour l’individu. Si l’on admet un premier couple réellement cultivé, il faut encore savoir comment il a formé ses élèves. Les premiers parents donnent à leurs enfants un premier exemple ; ceux-ci l’imitent, et ainsi se développent quelques dispositions naturelles. Mais toutes ne peuvent être cultivées de cette manière, car la plupart du temps les exemples ne s’offrent aux enfants que par occasion. Les hommes n’avaient autrefois aucune idée de la perfection dont


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