Page:Kant - Éléments métaphysiques de la doctrine du droit.djvu/509

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leur refusèrent sagement, sinon l’accès, du moins l’entrée de leur pays ; ils n’accordèrent même cet accès qu’à un seul peuple de l’Europe, aux Hollandais, et encore en leur interdisant, comme à des captifs, toute société avec les indigènes. Le pire (ou, pour juger les choses au point de vue de la morale, le mieux), c’est que l’on ne jouit pas de toutes ces violences, que toutes les sociétés de commerce qui les commettent touchent au moment de leur ruine, que les îles à sucre, ce repaire de l’esclavage le plus cruel et le plus raffiné, ne produisent pas de revenu réel et ne profitent qu’indirectement, ne servant d’ailleurs qu’à des vues peu louables, c’est-à-dire à former des matelots pour les flottes et à entretenir ainsi des guerres en Europe, et cela entre les mains des États qui se piquent le plus de dévotion et qui, en s’abreuvant d’iniquités, veulent passer pour des élus en fait d’orthodoxie.

Les relations (plus ou moins étroites), qui se sont établies entre tous les peuples de la terre, ayant été portées au point qu’une violation du droit commise en un lieu se fait sentir dans tous, l’idée d’un droit cosmopolitique ne peut plus passer pour une exagération fantastique du droit ; elle apparaît comme le complément nécessaire de ce code non écrit, qui, comprenant le droit civil et le droit des gens, doit s’élever jusqu’au droit public des hommes en général, et par là jusqu’à la paix perpétuelle, dont on peut se flatter, mais à cette seule condition, de se rapprocher continuellement.





    mais Om, que La Croze traduit par benedictus, béni, ne peut guère, appliqué à la divinité, signifier autre chose que bienheureux, p. 507. Or, comme le père Horace, qui demandait souvent aux lamas du Tibet ce qu’ils entendaient par Dieu (Concioa), en recevait toujours cette réponse : « c’est l’assemblée de tous les saints » (c’est-à-dire des âmes bienheureuses, revenues enfin à l’état de divinité par le moyen de la régénération lamaïque, après beaucoup de passages à travers toutes sortes de corps, et changées en Burchane, c’est-à-dire en êtres dignes d’adoration, p. 223), cette expression mystérieuse, Konx Ompax, doit désigner l’Être suprême, saint (Konx) bienheureux (Om) et sage (Pax), répandu partout dans le monde (la nature personnifiée) ; et, dans les mystères grecs, elle devait signifier pour les initiés le monothéisme, par opposition au polythéisme du peuple, quoique le père Horace (a.a.O.) y soupçonne l’athéisme. — Mais comment cette expérience mystérieuse est-elle arrivée aux Grecs par le Tibet, c’est ce que l’on peut expliquer de la manière qu’on a vue plus haut, et réciproquement on peut rendre par là vraisemblables les relations plus récentes de l’Europe avec la Chine à travers le Tibet (relation qui sont peut-être plus anciennes que celles qu’elle a eues avec l’Indostan).