Page:Kant - Anthropologie.djvu/204

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1° L’objet peut être agréable, et la jouissance qu’on y trouve déplaire. De là l’expression de joie amère. — Celui qui est dans des circonstances de fortune pénibles, et qui hérite de ses parents ou d’un proche estimable et bienfaisant, ne peut pas s’empêcher d’éprouver une certaine joie de leur mort, mais il n’a pas à se la reprocher. C’est ce qui se passe dans l’âme d’un subordonné destiné à l’avancement, lorsqu’il assiste avec affliction sincère aux funérailles d’un supérieur qu’il honorait.

2° L’objet peut être désagréable, et la douleur qu’on en ressent avoir son charme. De là l’expression de douce peine, par exemple celle d’une veuve, d’ailleurs à son aise, qui ne veut pas se laisser consoler ; ce qui est souvent une affectation inconvenante.

Au contraire, la jouissance peut plaire encore par la raison que l’homme trouve du plaisir aux objets dont il est fier de s’occuper ; par exemple, l’étude des beaux-arts, au lieu de la jouissance purement sensible, et de plus, la satisfaction d’être capable d’une jouissance de cette nature (d’être un homme de goût). — De même la peine d’un homme peut lui déplaire encore par une autre raison. Toute haine résultant d’une offense est une peine ; mais l’homme qui pense sainement ne peut cependant pas se la reprocher sous prétexte que, même après la satisfaction, il reste toujours un certain ressentiment.