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INTRODUCTION 41

qu’il faut que cela soit, d’une manière nécessaire, ainsi et non pas autrement. Elle ne nous donne, par cela même, aucune véritable universalité, et la raison qui est si avide de connaissances de cette espèce est plus excitée par elle que satisfaite. Or, des connaissances universelles, qui présentent en

II. Nous possédons certaines connaissances a priori, et même le sens commun n’est jamais sans en avoir de telles.

Il nous faut maintenant un critérium qui permette de distinguer sûrement une connaissance pure de la connaissance empirique. L’expérience nous apprend bien que quelque chose est de telle ou telle manière, mais non point que cela ne peut être autrement. Si donc, PREMIÈREMENT, on trouve une proposition dont la pensée implique la nécessité, on a un jugement a priori ; si cette proposition n’est, en outre, dérivée que d’une autre qui vaut elle-même, à son tour, à titre de proposition nécessaire, elle est absolument a priori. SECONDEMENT, l’expérience ne donne jamais à ses jugements une véritable et stricte universalité, mais seulement une universalité supposée et relative (par induction), qui n’a pas d’autre sens que celui-ci : nos observations, pour nombreuses qu’elles aient été jusqu’ici, n’ont jamais trouvé d’exception à telle ou telle règle. Par conséquent, un jugement pensé avec une stricte universalité, c’est-à-dire, de telle sorte qu’aucune exception n’est admise comme possible, ne dérive point de l’expérience, mais est valable absolument a priori. L’universalité empirique n’est donc qu’une élévation arbitraire de la valeur ; on l’ait d’une règle valable dans la plupart des cas une loi qui s’applique à tous, comme, par exemple, dans la proposition : Tous les corps sont pesants. Quand, au contraire, un jugement possède essentiellement une stricte universalité, on connaît à cela qu’il provient d’une source particulière de la connaissance, d’un pouvoir de connaissance a priori. Nécessité et stricte universalité sont donc les marques sûres d’une connaissance a priori et elles sont indissolublement unies l’une à l’autre. Mais comme, dans l’application de ces critères[1], il est quelquefois plus facile de montrer la limitation empirique que la contingence des jugements, ou que parfois aussi il est plus convaincant de faire voir, d’un jugement, l’universalité illimitée que nous lui attribuons que d’en indiquer la nécessité, il convient d’employer séparément ces deux critères dont chacun par lui-même est infaillible (1).

Or, que des jugements de cette espèce, nécessaires et universels

  1. Derselben, ou de ces connaissances a priori.