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DE LA RAISON PURE


permanence du réel dans le temps ; b. comme schème de la causalité, la succession des éléments divers soumise à une règle commune ; c. comme schème de la réciprocité, la simultanéité des déterminations d’une substance avec celles des antres suivant une règle générale ; 4° enfin, dans la catégorie de la modalité, comme schème de la possibilité, la détermination de la représentation d’une chose par rapport à quelque temps (comme, par exemple, que les contraires ne peuvent exister en même temps dans une chose, mais seulement d’une manière successive) ; comme schème de l’existence, la présence d’un objet dans un temps déterminé, et comme schème de la nécessité, l’existence d’un objet en tout temps.

On voit que le temps est comme le fond commun de tous les schèmes que nous venons de passer en revue. Ces schèmes ne sont eux-mêmes autre chose que des déterminations à priori du temps faites suivant certaines règles et concernant soit la série du temps, ou la synthèse du temps dans l’appréhension successive d’un objet (quantité), soit le contenu du temps, ou ce qui le remplit {qualité), soit l’ordre du temps, ou le rapport qui unit les perceptions en tout temps (relation), soit enfin l’ensemble du temps par rapport à tous les objets possibles (modalité}.

On voit aussi que tout ce schématisme de l’entendement ne tend qu’à opérer l’unité de tous les éléments divers dans le sens intérieur et par là l’unité de l’aperception, et qu’en permettant d’appliquer la catégorie à des objets d’expérience possible, il leur donne une signification qu’elles n’auraient pas sans lui. Que signifierait, par exemple, le concept de la substance sans la détermination sensible de la permanence ? Je puis bien la concevoir comme un sujet qui n’est pas le prédicat d’une autre chose, mais quel usage puis-je faire de ce concept auquel ne correspond aucun objet déterminable ? Ce sont les schèmes qui réalisent les concepts purs de l’entendement. « Les catégories, sans schèmes, dit Kant en terminant (p. 208), ne sont que des fonctions de l’entendement relatives aux concepts, mais qui ne représentent aucun objet. Leur signification leur vient de la sensibilité, qui réalise l’entendement, mais qui en même temps le restreint. »

Système des principes de l’entendement pur.

Après avoir indiqué les conditions générales qui permettent à l’entendement d’appliquer ses concepts purs à des jugements synthétiques, il faut rechercher quels sont les jugements qu’il