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Page:Kant - Critique de la raison pure, I-Intro.djvu/67

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ANALYSE DE LA CRITIQUE

L’erreur relevée ici par Kant consiste à rendre transcendental l’usage de l’entendement, c’est-à-dire à croire que ses concepts s’appliquent directement aux objets, tandis que nous ne pouvons connaître ceux-ci que par le moyen et sous les conditions de l’intuition sensible, c’est-à-dire comme phénomènes. La cause de cette erreur vient de ce que, comme les conditions de la pensée précèdent tout ordre déterminé des représentations, qui n’est possible que par elles, nous concevons ainsi quelque chose en général, que nous distinguons, en faisant abstraction de toute intuition sensible, comme s’il avait une existence réelle : « il nous reste alors, dit Kant (p. 351), une manière de le déterminer uniquement par la pensée, laquelle n’est, il est vrai, qu’une simple forme logique sans matière, mais semble pourtant être une manière dont l’objet existe en soi (noumenon), indépendamment de l’intuition, qui est bornée à nos sens. »

Pour compléter le système de l’analytique transcendentale. Kant ajoute ici un tableau de concepts du rien. Comme ce tableau n’a pas, ainsi que l’auteur le reconnaît lui-même, une grand importance, je crois pouvoir le négliger dans cette analyse, déjà si longue, et je me borne à renvoyer sur ce point le lecteur à ma traduction (p. 351-353).

Dialectique transcendentale.

Nous arrivons maintenant à la seconde des deux grandes divisions de la Logique transcendentale : la dialectique transcendentale.

Objet de cette dialectique.

Les principes de l’entendement pur exposés par l’analytique transcendentale, n’ont d’autre usage que de s’appliquer à l’expérience ; et, en tant qu’ils se renferment dans ces limites, ils sont immanents. Nous avons vu tout à l’heure comment l’esprit tombe dans l’erreur en transformant cet usage empirique en un usage transcendental ; mais il ne se borne pas là : une fois qu’il a franchi ces limites, il s’arroge un domaine entièrement nouveau où il ne reconnaît plus aucune démarcation. Les principes qui s’attribuent une telle portée sont transcendants. L’apparence ou l’illusion qui se produit ici est naturelle, comme on le verra tout à l’heure ; il ne nous est même pas possible de l’éviter, même quand nous sommes avertis de notre illusion, pas plus que nous ne pouvons faire que la l’une ne nous paraisse pas plus grande à l’horizon qu’au zénith ; mais, si nous ne pouvons dis-