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MÉTHODOLOGIE TRANSCENDENTALE


rattachée, comme principe d’explication, à ce qui est réellement donné et à ce qui par conséquent est certain, et alors elle s’appelle une hypothèse.

Comme nous ne pouvons nous faire le moindre concept de la liaison dynamique à priori, et que la catégorie de l’entendement pur ne sert pas à la trouver, mais seulement à la comprendre quand elle se rencontre dans l’expérience, nous ne saurions imaginer originairement, conformément à ces catégories, un seul objet d’une nature nouvelle et ne pouvant être montrée dans l’expérience, ni donner un objet de ce genre pour fondement à une hypothèse légitime ; car ce serait soumettre à la raison de vaines chimères, au lieu des concepts des choses. Ainsi il n’est point permis d’imaginer de nouvelles facultés premières, comme par exemple un entendement capable de percevoir son objet sans le secours des sens, ou une force attractive sans contact, ni une nouvelle espèce de substances, une substance, par exemple, qui soit présente dans l’espace sans impénétrabilité, ni par conséquent un commerce des substances qui soit distinct de ceux que l’expérience nous fournit : aucune présence sinon dans l’espace, aucune durée sinon dans le temps. En un mot, notre raison ne peut que se servir des conditions de l’expérience possible, comme de conditions de la possibilité des choses ; mais elle ne peut nullement se créer en quelque sorte des choses tout à fait indépendamment de ces conditions ; car des concepts de ce genre, sans impliquer de contradiction, seraient cependant sans objet.

Les concepts rationnels sont, comme on l’a vu, de simples idées, et ils n’ont point d’objet dans quelque expérience, mais ils ne désignent pas pour cela des objets fictifs qui seraient en même temps regardés comme possibles.