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DU TRADUCTEUR.


germe de la théorie exposée dans la Critique du Jugement, et bien moins encore une théorie philosophique sur la question du beau et du sublime. Kant n’a point ici une si haute prétention ; il veut seulement, comme il en avertit dès le début, présenter quelques observations sur les sentiments du beau et du sublime. Il considère ces sentiments relativement à leurs objets, aux caractères des individus, aux sexes et aux rapports des sexes entre eux, et enfin aux caractères des peuples. Ce petit ouvrage n’est donc qu’un recueil d’observations. On n’y pressent pas le profond et abstrait auteur de la Critique de la raison pure ; Kant n’est encore que le beau professeur de Kœnigsberg, comme on l’appellait dans sa ville natale (1)[1]. Or il excelle autant dans le genre auquel appartient ce petit écrit que dans la métaphysique. Il se montre ici aussi fin et spirituel observateur qu’ailleurs subtil et profond analyste. On admirera la justesse et souvent la délicatesse de ses observations, un heureux et rare mélange de finesse et de bonhomie (2)[2], enfin le tour ingénieux et vif qu’il donne à ses idées et où paraît clairement l’influence

  1. (1) Voyez la préface de Rosenkranz au volume de son édition qui contient la Critique du Jugement et les Observations sur le sentiment du beau et du sublime (Vorrede, s. viii).
  2. (2) Ce mélange de finesse et de bonhomie est une des qualités les plus saillantes du caractère de Kant. C’est encore un trait qu’il a de commun avec Socrate auquel on l’a justement comparé.