Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/317

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pour dissiper le mécontentement de l’esprit, en sorte qu’on se rend toujours plus inutile et plus mécontent de soi-même. En général les beautés de la nature «ont les plus importantes pour ce but, quand on s’est habitué de bonne heure à les contempler, à les juger et à les admirer.


§. LIII.

Comparaison de la valeur esthétique des Beaux-Arts.

Le premier rang entre tous les arts appartient à la poésie (qui doit presque entièrement son origine au génie et qui ne se laisse guère diriger par des règles ou par des exemples). Elle étend l’esprit en mettant l’imagination en liberté, en présentant, à l’occasion d’un concept donné, parmi l’infinie variété des formes qui peuvent s’accorder avec ce concept, celle qui en lie l’exhibition à une abondance de pensées à laquelle aucune expression n’est parfaitement adéquate, et en s’élevant ainsi esthétiquement, à des idées. Elle le fortifie en lui faisant sentir cette faculté libre, spontanée, indépendante des conditions de la nature, par laquelle il considère et juge la nature comme un phénomène, d’après des vues que celle-ci ne présente par elle-même dans l’expérience ni au sens ni à l’entendement, et par laquelle, par consé-