son devoir que par l’espérance du bonheur qu’il se
procurera ainsi. — Il y a en outre une contradiction
dans cette subtilité. En effet, d’un côté, il faut qu’il
fasse d’abord son devoir, sans se demander ce qui en
résultera pour son bonheur, et que par conséquent il
agisse d’après un principe moral ; mais de l’autre, il
ne peut reconnaître quelque chose pour son devoir, s’il
n’en espère quelque bonheur, et par conséquent le
principe de sa conduite sera pathologique, c’est-à-dire
un principe justement contraire au premier.
J’ai ailleurs (dans le Recueil mensuel de Berlin) ramené, je crois, à sa plus simple expression la différence du plaisir pathologique et du plaisir moral. Le plaisir qui précède nécessairement l’observation d’une loi et qui nous pousse ainsi à suivre cette loi, est pathologique, et notre conduite rentre alors dans l’ordre naturel ; mais celui que précède nécessairement la loi, et qui ne peut être senti qu’à cette condition, appartient à l’ordre moral. — Si l’on méconnaît cette distinction et que l’on substitue le principe du bonheur (l’eudémonie) à celui de la liberté, sur lequel doit reposer la législation intérieure (l’éleuthéronomie), la conséquence sera la mort insensible (l’euthanasie) de toute morale.
La cause de cette erreur est bien simple. L’impératif catégorique, qui dicte les lois morales d’un ton absolu[1], ne peut entrer dans l’esprit de ceux qui sont exclusivement accoutumés aux explications physiologiques, quoiqu’ils se sentent irrésistiblement obligés
- ↑ Dictatorisch.