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DOCTRINE DE LA VERTU


nature[1], par où l’on entend cette liaison de cause à effet, où, sans attribuer pour cela de l’intelligence à la cause, on la conçoit cependant, par analogie avec une cause intelligente, comme si elle produisait son effet avec intention. Or il s’agit de savoir si l’usage des facultés qui nous ont été données pour la conservation ou pour la reproduction de l’espèce est soumis, relativement à la personne même qui les possède, à une loi du devoir restrictive, ou si nous pouvons, sans manquer à un devoir envers nous-mêmes, nous servir de nos facultés sexuelles pour le seul plaisir physique et sans égard au but pour lequel elles nous ont été données. — On démontre dans la doctrine du droit que l’homme ne peut se servir d’une autre personne pour se procurer ce plaisir, que sous la condition expresse d’un pacte juridique, où deux personnes contractent des obligations réciproques. Mais ici la question est de savoir si, par rapport à cette jouissance, il y a un devoir envers soi-même dont la transgression souille[2] (je ne dis pas seulement ravale[3]) l’humanité dans sa propre personne. Le penchant à ce plaisir s’appelle amour de la chair[4] (ou simplement volupté). Le vice qui en résulte se nomme impudicité[5], et la vertu opposée à ce vice, chasteté[6]. Lorsque l’homme est poussé à la volupté, non par un objet réel, mais par une fantaisie qu’il se crée à lui-même, et qui par conséquent est contraire au but de la nature, on dit alors que la volupté est contre nature[7]. Elle est même contraire à

  1. Naturzweck.
  2. Schändung.
  3. Abwürdigung.
  4. Fleischeslust.
  5. Unkeuschheit.
  6. Keuschheit.
  7. Unnatürlich.