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DEVOIRS ENVERS SOI-MÊME.


CHAPITRE SECOND.
DES DEVOIRS DE L’HOMME ENVERS LUI-MÊME, EN TANT QU’ÊTRE MORAL.
Ils sont opposés aux vices du mensonge, de l’avarice et de la fausse humilité (de la bassesse).

ARTICLE PREMIER.
Du mensonge.
§ 9.

La plus grande transgression du devoir de l’homme envers lui-même, considéré simplement comme être moral (envers l’humanité qui réside en sa personne), c’est le contraire de la véracité, c’est-à-dire le mensonge (aliud lingua promptum, aliud pectore inclusum gerere). Il est de soi-même évident que toute fausseté volontaire dans l’expression de ses pensées (qui dans la doctrine du droit ne prend le nom de mensonge que quand elle porte atteinte au droit d’autrui), encourt inévitablement cette dure qualification dans l’éthique, pour qui l’absence de tout dommage ne légitime point une chose mauvaise en soi. Le déshonneur (qui consiste à devenir un objet de mépris moral) suit le mensonge, et accompagne le menteur comme son ombre. — Le mensonge peut être extérieur (mendacium externum), ou intérieur. Par le premier, l’homme se rend méprisable aux yeux des autres ; par le second, ce qui est encore pis, il se rend méprisable à ses propres yeux, et offense la dignité de l’humanité dans sa personne. Nous n’avons à tenir compte ni du tort que le mensonge peut causer