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DE L’ÉDUCATION PHYSIQUE.


Les parents se trompent ordinairement ici, et croient pouvoir plus tard réparer le mal, en refusant à leurs enfants tout ce qu’ils demandent. Mais il est très-absurde de leur refuser sans raison ce qu’ils attendent de la bonté de leurs parents, uniquement pour leur faire éprouver une résistance et leur faire sentir qu’ils sont les plus faibles.

On gâte les enfants en faisant tout ce qu’ils veulent, et on les élève très-mal en allant toujours au-devant de leurs volontés et de leurs désirs. C’est ce qui arrive ordinairement, tant que les enfants sont un jouet pour leurs parents, surtout dans le temps où ils commencent à parler. Mais cette indulgence leur cause un grand dommage pour toute leur vie. En allant au-devant de leurs volontés, on les empêche sans doute de témoigner leur mauvaise humeur, mais ils n’en deviennent que plus emportés. Ils n’ont pas encore appris à connaître comment ils doivent se conduire. — La règle qu’il faut observer à l’égard des enfants dès leur première jeunesse, c’est donc d’aller à leur secours, lorsqu’ils crient et que l’on croit qu’il leur arrive quelque mal, mais de les laisser crier, quand ils ne le font que par mauvaise humeur. Et c’est une conduite du même genre qu’il faut constamment tenir plus tard. La résistance que l’enfant rencontre dans ce cas est toute naturelle, et elle est proprement négative, puisqu’on ne fait que refuser de lui céder. Bien des enfants, au contraire, obtiennent de leurs parents tout ce qu’ils désirent, en ayant recours aux prières. Si on leur laisse tout obtenir par des cris, ils deviennent méchants ; mais, s’ils l’obtiennent par des prières, ils deviennent doux. À moins donc qu’on n’ait quelque puissant motif pour agir autrement il faut céder à la prière de l’enfant. Mais, si l’on a ses raisons pour n’y pas céder, on ne doit plus se laisser toucher par beaucoup de prières. Tout refus doit être irrévocable. C’est un moyen infaillible de n’avoir pas besoin de refuser souvent.

Supposez qu’il y ait dans l’enfant, ce que l’on ne peut toutefois admettre que très-rarement, un penchant naturel à l’indocilité, le mieux est, quand il ne fait rien pour nous être agréable, de ne rien faire non plus pour lui. — En brisant sa volonté, on lui inspire des sentiments serviles ; la résistance naturelle, au contraire, produit la docilité.

La culture morale doit se fonder sur des maximes, non sur