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PÉDAGOGIE.


de nulle ou de médiocre importance ; elles y trouvent même une preuve flatteuse pour elles des dispositions et des capacités supérieures de leurs enfants. C’est ici le lieu de faire usage du sentiment de la honte, car l’enfant le comprend très-bien dans ce cas. La rougeur de la honte nous trahit quand nous mentons, mais elle n’est pas toujours une preuve de mensonge. On rougit souvent de l’effronterie avec laquelle un autre nous accuse d’une faute. On ne doit à aucun prix chercher à arracher la vérité aux enfants par des punitions, dût leur mensonge entraîner après soi quelque dommage : ils seront punis alors pour ce dommage. La perte de l’estime est la seule punition qui convienne au mensonge.

Les punitions peuvent aussi se diviser en négatives et positives. Les premières s’appliqueraient à la paresse ou au manque de moralité ou au moins de politesse, comme le mensonge, le défaut de complaisance, l’insociabilité. Les punitions positives sont pour la méchanceté. Avant toutes choses il faut éviter de garder rancune aux enfants.

Un troisième trait du caractère de l’enfant, c’est la sociabilité[1]. Il doit même entretenir avec les autres des relations d’amitié et ne pas toujours vivre pour lui seul. Bien des maîtres sont, il est vrai, contraires à cette idée ; mais cela est très-injuste. Les enfants doivent se préparer ainsi à la plus douce de toutes les jouissances de la vie. De leur côté, les maîtres ne doivent préférer aucun d’entre eux pour ses talents, mais seulement pour son caractère ; autrement il en résulterait une jalousie qui serait contraire à l’amitié.

Les enfants doivent aussi être candides[2], et leurs regards doivent être aussi sereins que le soleil. Un cœur content est seul capable de trouver du plaisir dans le bien. Toute religion qui assombrit l’homme est fausse, car il doit servir Dieu avec plaisir et non par contrainte. Il ne faut pas toujours retenir la gaieté sous la dure contrainte de l’école, car dans ce cas elle serait bientôt anéantie. La liberté l’entretient. C’est à cela que servent certains jeux où le cœur s’épanouit et où l’enfant s’efforce toujours de devancer ou de surpasser ses camarades. L’âme redevient alors sereine. Beaucoup de gens regardent

  1. Geselligkeit.
  2. Offenherzig.