L’éducation pratique comprend : 1o l’habileté[1] ; 2o la prudence[2] ; 3o la moralité. Pour ce qui est de l’habileté, il faut veiller à ce qu’elle soit solide et non pas fugitive. On ne doit pas avoir l’air de posséder la connaissance de choses, que l’on ne peut pas ensuite réaliser. La solidité doit être la qualité de l’habileté et tourner insensiblement en habitude dans l’esprit[3]. C’est le point essentiel du caractère d’un homme. L’habileté est nécessaire au talent.
Pour ce qui est de la prudence, elle consiste dans l’art d’appliquer notre habileté à l’homme, c’est-à-dire de nous servir des hommes pour nos propres fins. Pour l’acquérir, bien des conditions sont nécessaires. C’est proprement la dernière chose dans l’homme, mais par son prix elle occupe le second rang.
Pour qu’un enfant puisse se livrer à la prudence, il faut qu’il se rende caché et impénétrable, tout en sachant pénétrer les autres. C’est surtout sous le rapport du caractère qu’il doit être caché. L’art de l’apparence extérieure est la convenance[4]. Et c’est un art qu’il faut posséder. Il est difficile de pénétrer les autres, mais on doit nécessairement comprendre l’art de se rendre soi-même impénétrable. Il faut pour cela dissimuler, c’est-à-dire cacher ses fautes. Dissimuler[5] n’est pas toujours feindre[6] et peut être parfois permis, mais cela touche de près à l’immoralité[7]. La dissimulation est un moyen désespéré. La prudence exige que l’on ne montre pas trop de fougue, mais il ne faut pas non plus être trop indolent. On ne doit donc pas être emporté[8], mais vif[9], ce qui n’est pas la même chose. Un homme vif (strenuus) est celui qui a du plaisir à vouloir. Il s’agit ici de la modération de l’affection. La prudence concerne le tempérament.