Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/127

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nous devons, suivant une juste maxime de la philosophie de la nature, nous abstenir de toute explication de l’arrangement des choses, qui serait tirée de la volonté d’un être suprême, parce que ce n’est plus là de la philosophie naturelle, mais un aveu du terme de notre connaissance. Ces idées ont donc une tout autre destination pratique que les catégories qui seules, avec les principes dont elles sont le fondement, rendent l’expérience possible. Cependant notre laborieuse Analytique de l’entendement serait tout à fait superflue, si nous n’avions d’autre but que la simple connaissance de la nature, telle qu’elle peut être donnée dans l’expérience ; car la raison s’acquittera sûrement et bien de sa tâche en mathématiques et en physique sans toute cette subtile déduction. Notre Critique de l’entendement avec les Idées de la raison pure tend à un but plus élevé que l’usage expérimental de l’entendement, but dont plus haut nous avons dit cependant qu’il est à cet égard tout à fait impossible et sans objet ou signification. Mais il doit néanmoins y avoir accord entre ce qui appartient à la nature et à la raison, et celle-là doit contribuer à la perfection de la seconde, et ne peut la confondre.

La solution de cette question est la suivante : la raison n’a pas en perspective, dans ses Idées, des objets particuliers, qui dépassent le champ de l’expérience, elle ne demande au contraire que la plénitude de l’usage intellectuel dans l’enchaînement de l’expérience. Mais cette plénitude ne peut être que celle des principes, et non celle des intuitions et des objets. Néan-