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PROGRÈS DE LA MÉTAPHYSIQUE


avec entier désistement de connaissance théorique (suspensio judicii). Il ne s’agit presque uniquement que du nom à donner à cette modalité de notre croyance, de manière qu’il ne dise pas moins (comme dans la simple opinion), ni pas plus (comme dans la vraisemblance), qu’il ne convient pour le but proposé, et ne donne gain de cause au scepticisme.

Mais une persuasion qui est une vraisemblance dont on ne peut décider en soi-même si elle repose sur des raisons purement subjectives, ou sur des raisons objectives, est opposée à la persuasion purement sentie, dans laquelle le sujet croit en avoir conscience et l’estime suffisante, quoi qu’il ne puisse pas la nommer ni par conséquent s’en expliquer clairement la liaison avec l’objet. Ni l’une ni l’autre ne peuvent être regardées comme appartenant à la modalité de la vraisemblance dans la connaissance dogmatique, que cette » connaissance soit théorique ou pratique, parce que la connaissance dogmatique doit avoir lieu par principes, et par conséquent être susceptible d’une représentation claire, intelligible et communicable.

Le mot foi peut donc convenir pour rendre cette croyance de l’opiner et du savoir comme fondée sur un jugement critique dans un but théorique, si par foi l’on entend une supposition (hypothesis) qui n’est nécessaire que comme base d’une règle pratique, objective, de la conduite. Nous voyons la possibilité de l’exécution et de l’objet en soi qui en résulte ; et quoique cette connaissance ne soit pas théorique, nous y reconnaissons subjectivement la seule manière d’approprier l’exécution à la fin dernière.